Après Incendies, drame sur fond de guerre, le thriller Prisoners et la fable surréaliste Enemy, le Canadien Denis Villeneuve opte pour un thriller façon narco, où rien n’est vraiment ce qu’il y paraît
On ne peut pas dire qu’il se passe grand-chose durant les trois premiers quarts d’heure de Sicario. On y est témoin d’un raid mené par la CIA au Mexique – avec pour seuls témoins des membres du FBI –, et la plupart des personnages principaux sont ainsi présentés. Mais le trio formé par le réalisateur Denis Villeneuve, le caméraman Roger Deakins et le compositeur Jóhann Jóhannsson met en place une ambiance prenante pour un premier acte très épique. Ce n’est qu’après que Villeneuve laisse exploser son intrigue, alors que le personnage principal découvre qu’elle n’a en réalité assisté qu’à une mise en scène, et que d’ailleurs, cette impression de fausseté va bien au-delà de cet unique moment. L’aspect politique de l’histoire est évidemment employé à très bon escient par Villeneuve (ou son scénariste). Le machiavélisme de la CIA qui joue intelligemment des inimitiés de chacun est plus un complot masculin prenant pour cible la seule femme du groupe, et accessoirement, l’un des seuls personnages doté de droiture. On regrettera seulement qu’Emily Blunt ait l’air trop fragile aux côtés de Benicio del Toro et Josh Brolin.
Mais ce n’est vraiment qu’un micro détail négatif, dans un film qui trouve l’équilibre parfait entre la production d’art et d’essai et la machine hollywoodienne. On n’a pas fini d’en entendre parler de ce Villeneuve.